Comme on traîne un bout de terre de la route en rentrant de promenade, ma peinture dépose à la surface du tableau les signes et sensations récoltés dans l’espace, les éléments saisis du monde par un regard attentif et sensible. Dès mes premiers travaux, je me suis constitué un territoire sensitif et mémoriel, ou plus justement, un territoire sensitif entre le vécu et l’imaginaire, qui sert de support à ma peinture. 

Autodidacte, la peinture a pour moi, valeur d’évocation plutôt que valeur de représentation ou de figuration, même si celle – ci est opérante. Nul besoin de réalisme absolu, plutôt une superposition d’éléments en couches successives de lavis d’acryliques mates sur métallisées qui engendre la spatialisation d’un récit, d’un imaginaire, d’une sensation. Des sujets noyés dans un torrent de matière, avec leurs perspectives et leurs profondeurs. C’est ma manière d’occuper la surface : Tourner autour et dedans, se frotter aux bords ou s’inscrire en son centre. 

Des espaces mixtes de désirs et de souvenirs, ils se présentent comme des masses colorées, blocs de couleur qui figent l’espace naturel, l’aplatissent, le décollent de la perspective. Des éléments hétérogènes qui se cognent telles des plaques géologiques et s’ajustent à leurs bords. Mon processus créatif est celui d’un regard qui sédimente le réel visible en suspendant le temps.